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Kamishibaï, l'art de conter des histoires

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À l’arrière de son vélo, dans les rues de Tokyo, un petit monsieur transporte une curieuse boite en bois. C’est le bonhomme Kamishibaï qui emmène dans son butaï des mondes merveilleux qu’il va conter aux passants. L’art ancestral japonais qu’est le Kamishibaï est arrivé en Europe dans les années 1970 et n’a cessé, depuis, d’émerveiller petits et grands. Découvrez cet art millénaire de conter les histoires.

Théâtre d’images japonais : Le Kamishibaï

 

Quand l’album illustré devient un espace scénique

Le 紙芝居, romanisé kamishibaï, signifie littéralement jeu théâtral en papier. C’est une technique de conte basée sur des images de dimension prédéfinies, cartonnées ou papier, qui défilent dans un petit théâtre de bois ou de carton, avec des battants refermables, appelé butaï (舞台, scène). Il peut être rapproché du théâtre de Guignol dans sa forme, mais où les marionnettes laisseraient la place à des images.

Les planches cartonnées, illustrations du kamishibaï, déroulent une histoire, planche après planche. Le recto couvert d’illustration et tourné vers le public, se complète d’un verso où se trouve le texte destiné au conteur. La transition entre les planches est guidée par les indications scéniques intégrées au texte et se veut donner du mouvement aux illustrations. Transportable facilement et déployable un peu partout (originairement à l’arrière d’un vélo), c’est un outil intéressant pour l’apprentissage de la lecture de l’image, de la lecture à haute voix ou encore la création et l’écriture d’histoires par les enfants.

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Gwladys Pissot, conteuse Kamishibaï. Crédit photo : Stevrare 

Cette forme, à la croisée de l’image et du texte, semblant de récit mis en scène, a suivi l’histoire du Japon depuis le VIIIe siècle. Son origine véritable remonterait au XIIe siècle, quand les moines des temples bouddhistes se servaient des emaki (rouleaux de dessins) pour transmettre des histoires à contenu moralisant à une audience généralement illettrée. Oublié par l’histoire, il renaît vers la fin du XIXe siècle, simultanément de l’apparition du cinéma au Japon. C’est finalement en 1923 qu’apparaît le premier kamishibai pour enfants, La Chauve-souris d’or (Ōgon Bat), inspiré des mangas (mot désignant initialement les croquis burlesques créés par le peintre Hokusai au XVIIIe siècle).

Les années 50 sont considérées comme l’âge d’or du kamishibai : près de 50 000 conteurs se produisant dans tout le pays. Ōgon Bat était l’un des personnages les plus populaires, et de nombreuses histoires le mettant en scène étaient créées par divers auteurs. Plusieurs grands mangakas débutèrent par le kamishibai, tels que Shigeru Mizuki, Gōseki Kojima ou Sampei Shirato. Le kamishibai était alors parfois appelé gageki (画劇), « théâtre en images ». La télévision et les magazines hebdomadaires firent cependant disparaitre le kamishibai en le remplaçant dans les années 1960.

Depuis les années 1970, le kamishibai s’est répandu dans le monde (Suisse, France, Hollande, Belgique, États-Unis…) en s’adaptant aux conditions culturelles des pays d’accueil. Le kamishibai comme technique de conte peut se rattacher au domaine du théâtre d’objet ou d’effigie et permet de proposer des spectacles qui s’appuient sur un dispositif léger. Ils peuvent être joués en appartement autant qu’en collectivité. Quelques compagnies professionnelles de théâtre et marionnettes proposent des spectacles mettant en jeu la technique du kamishibai.

 

Cet article a vu le jour suite au spectacle C’est dans la poche qui s’inspire du Kamishibaï avec des installations faîtes à vue sur une petite table à roulettes, sur fond de poche à fermeture éclair. Ainsi que La cabane à secrets de Kaori Ito.